En Seine Maritime, Guillaume Pennelle, le nouveau secrétaire départemental du Front National, travaille main dans la main avec des identitaires de la région rouennaise. Rien d’étonnant quand on sait que la tête de liste dans la région Normandie, Nicolas Bay, également secrétaire général du FN, est l’ancien n°2 du MNR de Bruno Mégret, un mouvement qui a su entretenir, au début des années 2000, de très bonnes relations avec les groupuscules radicaux, avant et après la création des Identitaires… Comme le FN aujourd’hui.

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Marine Le Pen, Marion Maréchal-Le Pen et Philippe Vardon.

Cela fait maintenant environ deux ans que l’entreprise de « dédiabolisation » au sein du Front national ne concerne plus les militants identitaires. Ils sont désormais les bienvenus dans le parti de Marine Le Pen, en particulier dans les mairies qu’il contrôle : l’ancien porte-parole de Génération identitaire Damien Rieu, était chargé de communication à Beaucaire (il a depuis été embauché mi-2016 par le groupe FN du conseil régional PACA comme responsable de la communication), tout comme Julien Langella à Cogolin. Alors que, il y a à peine plus de trois ans, Philippe Vardon, membre fondateur et leader historique des Identitaires, se voyait retirer précipitamment sa carte du Rassemblement Bleu Marine soi-disant en raison de son activisme racialiste, il est aujourd’hui élu régional FN et régulièrement présent aux côtés de Marion Maréchal Le Pen, sans n’avoir jamais rien renié de ses convictions. Condamné en octobre dernier à six mois de prison ferme pour des violences commises dans la ville FN de Fréjus, Vardon a d’ailleurs été soutenu par le n°3 du FN, Nicolas Bay, qui a réagi sur Twitter en déclarant : « Protéger sa famille agressée par la racaille multirécidiviste est donc passible de six mois de prison. » Ce soutien à un militant identitaire n’a rien d’étonnant de la part du secrétaire général du FN : on se souvient que Médiapart avait déjà révélé que l’assistant parlementaire de l’eurodéputé Nicolas Bay n’était autre que Guillaume Pradoura, qui avait lancé les Jeunesses identitaires Massilia avec l’appui discret de Stéphane Ravier, conseiller municipal FN à Marseille.

Nicolas Bay, identitaire avant l’heure

Nicolas Bay
Nicolas Bay en 2004, 2010 et 2015.

Cette proximité avec les Identitaires n’est d’ailleurs pas récente. Lorsque survient la scission du FN à la fin des années 1990 et que Bruno Mégret part fonder le Mouvement National Républicain (MNR), Bay le suit et il est rapidement nommé directeur national adjoint du Mouvement National de la Jeunesse, créé au printemps 1999. Or la proximité des jeunes du MNR avec les militants nationalistes-révolutionnaires d’Unité radicale, qui seront à l’origine du mouvement des Identitaires trois ans plus tard, n’est un secret pour personne, et on retrouve régulièrement les uns aux initiatives des autres. Le 24 septembre 2000, dans son discours à la fête régionale du MNR d’Ile-de-France, Nicolas Bay, identitaire avant la lettre, tient des propos sans ambiguïté, en décrivant les militants du MNJ comme « l es acteurs de notre propre destin, d’être ceux qui, par leur engagement, par leurs combats, par leur ardeur, par leurs sacrifices peut-être, vont forger la France française dans l’Europe européenne que nous appelons de nos vœux. (…) la machine totalitaire du politiquement correct a tôt fait de montrer du doigt le combattant identitaire (…) [mais] Le camp de l’identité s’est constitué et ceux qui veulent le rejoindre ne peuvent l’ignorer. » En 2007, il est d’ailleurs chargé de favoriser les contact avec les autres formations d’extrême droite.

Guillaume Pennelle
Guillaume Pennelle

Le FN sur Rouen

Or il se trouve qu’en 2008, le conseil national du FN, qui lui aussi cherche d’une part à sortir de l’isolement dans lequel il se trouve et d’autre part de reconstruire un appareil militant qui ne s’est jamais remis de la scission : Marine Le Pen, alors vice-présidente exécutive, entame une politique de main tendue non seulement en direction des Identitaires, mais également des « félons » du MNR. C’est ainsi que, ironie du sort, après s’être opposé à Marine Le Pen aux élections régionales de 2004 et avoir tenu des propos peu amènes sur la « fille à papa », Nicolas Bay fait son retour dans le giron FN : il attendra plusieurs années que la présidente mette son mouchoir sur ses errements passés, et sa patience finit par être récompensée : nommé en 2011 membre du bureau politique par Marine Le Pen, il devient en 2012 secrétaire général adjoint, puis secrétaire général en 2014. Implanté dans la région rouennoise depuis de nombreuses années, Nicolas Bay est également nommé tête de liste pour la région Normandie aux élections de 2015. Le 6 décembre 2016, sur sa proposition, Guillaume Pennelle, conseiller municipal de Rouen et conseiller régional de Normandie, est nommé nouveau secrétaire départemental de la fédération FN de Seine-Maritime. Son frère aîné, Gilles Pennelle, a lui aussi été conseiller municipal FN de Rouen et conseiller régional de Normandie dans les années 1990-2000 avant de suivre lui aussi Bruno Mégret ; il est réapparu candidat FN en Bretagne pour les municipales de 2014, prenant directement la tête de la fédération… Ce qui confirme l’influence des anciens du MNR dans la région Ouest.

Goury et Balavoine, des identitaires au FN rouennais

NIcolas Goury
Nicolas Goury candidat FN en haut à gauche ; avec les identitaires de la Vague normande (en haut à droite) et ceux de Paris Fierté (en bas).
MAR
Le MAR de Rodolphe Crevelle.

Candidat FN à la mairie de Rouen aux élections municipales de 2014, Guillaume Pennelle avait sur sa liste (outre une personne condamnée à 10 mois de prison ferme pour violence avec arme à feu !) un certain Nicolas Goury (épinglé par Ras l’Front Rouen) qui se présentait alors comme un syndiqué CGT alors qu’il était surtout un militant d’extrême droite depuis des années, en particulier au sein du Mouvement Anti-Radar (MAR), au sein duquel évoluent plusieurs anciens militants du Bloc identitaire, comme Philippe Millau, Richard Roudier ou Jean-Marie Joly, mais aussi l’imposteur nationaliste Rodolphe Crevelle, à l’origine du MAR qui est, comme toutes les initiatives de Cervelle, un ballon de baudruche surtout destiné à faire le "buzz" et à ramasser des sous grâce au remboursement des frais de campagne.

Il est également passé par le groupuscule régionaliste la Vague normande, et Aujourd’hui, Goury est depuis la nomination de Pennelle membre du bureau du FN76 et responsable de la communication, et plus proche que jamais des Identitaires, puisqu’il a fait le déplacement jusqu’à la capitale le 14 janvier de cette année, pour participer à la petite sauterie organisée dans l’après-midi par les Identitaires de Paris-Fierté sur une péniche de bords de Seine. Notons au passage que Marion Maréchal Le Pen est venue passer une tête, tout comme Damien Rieu évoqué en début d’article.

Mathieu_Balavoine
EN haut : Mathieu Balavoine filme Nicolas Bay et Guillaume Pennelle. En bas : avec ses copains identitaires.

Mais Goury n’est pas un cas isolé, puisque Mathieu « Maurice » Balavoine, 26 ans, est également à la fois militant FN (et candidat aux départementales de 2015) et identitaire : interpelé le 26 mai 2013 lors de l’occupation organisée par Génération identitaire du toit du siège parisien du Parti socialiste, il a été condamné pour violation de domicile, menace et voies de fait. Comme on peut le voir sur la photo ci-dessus, il est lui aussi présent à la fois sur la péniche et à la marche de Paris Fierté le 14 janvier dernier et, une semaine plus tard, à la galette des rois de Nicolas Bay à Rouen le 21 janvier (c’est lui qui filme pour le FN). Enfin, lors des cantonales, son suppléant est un certain Marc-Henri Crevelle : militant identitaire rouennais de longue date, lui aussi interpellé pour l’occupation de Solférino, il est surtout le fils du mythomane Rodolphe Crevelle et collaborateur au Lys Noir , le journal anarcho-royaliste de son père… La boucle est bouclée !
La Horde