Lyon : une dentiste néonazie, « c’est sans danger »* ?

Le groupe antifasciste lyonnais la Gale a révélé il y a quelques jours qu’une dentiste d’une clinique de la métropole lyonnaise exhibait sur internet des tatouages nazis : elle a depuis été licenciée.

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À Sathonay-Camp, la clinique du groupe Labelia a été recouverte d’affiches révélant au public que l’une de leurs dentistes, Carolina G., n’hésitait pas, sous son propre nom, à publier sur Instagram des photos de ses tatouages néonazies : la Totenkopf des SS sur la nuque, un bidon de Zyklon B sur le bras…

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Elle posait également avec des t-shirts de la marque italienne « European Brotherhood », à qui on doit des visuels sans ambiguïté (comme le « WPWW » pour White Pride World Wide) qui est aussi un site de VPC diffusant de la musique néonazie, principalement germanique.

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European Brotherhood s’est associée à Beloyar, une marque russe de vêtements de même genre, pour produire un t-shirt avec comme slogan « Pride & Honour », probable clin d’œil au réseau international Blood & Honour (B&H), qui depuis plus de trente ans fait la promotion de groupes de musique néonazis.

Pour mémoire, tout au long des années 2000, en France, divers groupes se sont réclamés de B&H. BH Hexagone, dans la région lyonnaise, organisait entre autres des conventions de tatouages, comme le Oi ! Tattoo Fest. Une autre de ces sections locales, la section BH Midgard, a entretenu des liens étroits avec le groupe de RAC Fraction. Deux membres fondateurs des Identitaires faisaient partie de Fraction, dont Philippe Vardon qui est aujourd’hui conseiller régional et membre du bureau national du RN de Marine Le Pen. Le monde est petit !

Si petit même, qu’on retrouve notre dentiste elle aussi aux côtés d’amis arborant des t-shirts Blood & Honour, comme le montre cette photo une fois encore diffusée par la Gale : si les différents groupes B&H en France se font très discrets ces derniers temps, il reste toujours des gens pour entretenir la flamme, au Portugal ou ailleurs…

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D’ailleurs, au moins un ami néonazi de Carolina ne l’a pas oublié : il s’agit de Renaud Mannheim, du groupe lyonnais de RAC Match Retour, lui aussi amateur de B&H, et qui n’a pas hésité à changer sa photo de profil sur Facebook pour lui apporter son soutien :

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Capture d’écran de la page Facebook de Renaud Mannheim
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Quoiqu’il en soit, comme le rappelle la Gale, « l’exercice de la médecine est une profession sociale, nécessaire et vitale pour tous les individus, et notamment les plus opprimé.e.s ». On peut donc à juste titre s’inquiéter qu’une personne la pratique en admirant un régime qui a fait de la médecine un outil « d’hygiène raciale », à travers par exemple le programme T4 (visant à se « débarrasser » des personnes handicapées) ou les diverses expériences plus proches de la torture que de la médecine menées dans les camps nazis. Les dentistes ne faisaient d’ailleurs pas exception, comme Hermann Pook, dentiste SS en chef dans les camps de concentration et responsable de la récupération de l’or dentaire sur les corps des déporté·e·s assassiné·e·s…

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Hermann Pook : une nouvelle idée de tatou pour Garcia ?

Dans un premier temps, le groupe Labelia qui l’employait a annoncé porter plainte contre les antifascistes pour ce qu’elle estimait être un lynchage, tout en condamnant « avec la plus grande fermeté toute discrimination, révisionnisme ou négationnisme » et en affirmant ne pas avoir été au courant des tatouages de leur dentiste. Puis, dans un communiqué publié hier, le groupe annonce finalement que, « après une enquête approfondie basée sur des éléments factuels », il a décidé de licencier la dentiste : ses tatouages ne seraient donc finalement pas qu’une affaire privée. Carolina G. dit avoir porté plainte pour « diffamation », tout en supprimant toutes ses photos, ce qui est pour le moins contradictoire : de quoi avait-elle honte ?

Il faut dire que la presse locale s’est rapidement emparée de l’affaire, les articles se sont multipliés, poussant même le maire de la petite ville à réagir, dans une condamnation de la « gravité des faits », sans que l’on sache précisément ce qu’il considère comme le plus grave, d’avoir rendue publique cette affaire ou de faire l’apologie du nazisme ! Dans le même esprit « républicain » qui renvoie systématiquement dos à dos antifascistes et néonazis, le parquet de Lyon a ouvert une enquête à la fois pour « atteinte à la vie privée en vue de troubler la tranquillité d’autrui » et « provocation à la haine raciale » : suggère-t-il ainsi que dénoncer la provocation à la haine raciale serait troubler la tranquillité d’autrui ?

Nos camarades antifascistes lyonnais se retrouvent désormais dans le collimateur de la justice pour avoir mis à jour une situation qui, de l’aveu même du groupe Labelia, n’est pas tolérable. À nous de rester vigilant·e·s sur les suites de cette affaire, et de faire vivre, si nécessaire, la solidarité antifasciste !
La Horde

* Il s’agit de la célèbre réplique du nazi Szell dans le film réalisé par John Schlesinger en 1976,  Marathon Man  : surnommé "le dentiste", Szell torture dans cette scène le personnage interprété par Dustin Hoffman avec des instruments dentaires.