La dernière provocation en date des identitaires, Defend Europe, concernant le financement d’un bateau pour attaquer les embarcations de fortune des migrants a été l’objet de nombreux articles sur Internet. Ce succès médiatique est le fruit d’un travail qui est l’une des marques de fabrique des Identitaires français. Un savant mélange entre provocation et manipulation des faits, avec un seul objectif : faire parler d’eux.

Cette stratégie fut mise au point au milieu des années 2000 avec « les soupes au cochon », ces soupes populaires discriminatoires au cours desquelles quelques dizaines de repas ont certes été servis, non pas pour aider, avec humilité et dévouement, des personnes en difficulté, mais bien pour permettre aux Identitaires parisiens de jouer à la dînette tout en se mettant en scène afin d’attirer à eux des médias en mal de scandale. Le site antifasciste REFLEXes avait à l’époque analysé la supercherie.

Ce type d’opération de com’ ayant connu depuis un nouvel essor avec l’arrivée des réseaux sociaux, il nous semble donc pas inutile de rappeler qu’à d’autres reprises, différentes actions de ce mouvement ont reçu une couverture médiatique conséquente alors que dans la pratique ces campagnes reposaient sur des mensonges et une mise en scène de la réalité.

L’apéro Facebook saucisson

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C’est sans doute le plus beau coup médiatique des Identitaires, quand le triumvirat (Philippe Vardon, Fabrice Robert et Bruno Larebière) était aux commandes de la structure. En 2010, une nouvelle mode fait alors fureur, celle d’appels pour des apéros géants dans différentes villes, lancés à partir de Facebook. Devant l’ampleur du phénomène et les débordements constatés lors de ces apéros géants, l’Etat décide de surveiller les évènements, voire de les interdire. Une vague de protestation se lève alors sur Facebook, pour dénoncer cette entrave « aux libertés individuelles ». Flairant le bon coup, les Identitaires, créent de toute pièce la page Facebook d’une pseudo habitante du 18ème arrondissement parisien, une certaine Sylvie François, qui annonce la tenue d’un « apéro saucisson-pinard à la Goutte d’or ». Autant le dire tout de suite, les Identitaires n’ont alors pas l’intention de tenir l’évènement, et en seraient d’ailleurs bien incapables : ils comptent sur le fait que l’Etat va interdire l’évènement, leur permettant ainsi de bénéficier de la couverture médiatique qui concerne alors la répression des apéros Facebook.
Et effectivement, l’évènement attire les médias par son caractère ouvertement provocateur,  et fait l’objet de nombreux articles et enquêtes de la part de journaux, radios et chaînes de télévision. Néanmoins, pas un seul instant ces médias ne vont chercher à savoir qui est réellement cette Sylvie François, la mystérieuse habitante de la goutte d’Or à l’initiative de cet apéro, bien qu’ils constatent qu’il est impossible de la rencontrer, que visiblement elle maîtrise très mal la géographie du quartier et que personne ne semble la connaître dans sa rue. Et que dire de ces journalistes qui finissent malgre tout par avoir cette mystérieuse habitante au téléphone à plusieurs reprises sans être choqués par le fait qu’à chaque entretien la voix au bout du fil n’est jamais la même ?

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Au final, bien loin du quartier populaire de la goutte d’Or, c’est sur les Champs-Elysées que les Identitaires appellent les "résistants" à se retrouver.

L’emballement médiatique, dépassant largement les espérances initiales des Identitaires et l’arrivée d’éléments extérieurs comme Riposte Laïque (qui à l’époque sert de caution de gauche morale à l’évènement alors que ses membres avaient basculé à l’extrême droite depuis de nombreuses années), oblige les Identitaires à sortir du bois et organiser un rassemblement le 18 juinsur les Champs-Elysées, sur le thème de l’appel à la "résistance" : il faut dire que les Identitaires parisiens n’hésitent pas alors à récupérer la figure du général De Gaulle (ce qui est une provocation dans le camp nationaliste). Lors de ce rassemblement largement relayé par les médias, on voit les Identitaires révéler la supercherie initiale, sans qu’à un seul moment les médias ne fassent leur autocritique et reconnaissent s’être laissés dupés par les identitaires...

Paris Fierté et Starbucks

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Janvier 2013 : l’association Paris Fierté, une des nombreuses associations écrans derrière laquelle les identitaires parisiens se cachent pour mener leurs actions, annonce le lancement d’une campagne contre l’ouverture d’un Starbucks à Montmartre, place du Tertre. Très vite on trouve sur leurs sites et sur les réseaux sociaux, outre des visuels très vintage à même de flatter les bobos parisiens, des images de diffusion de tracts devant la vitrine d’un Starbucks. On a également le droit à la pose des militants identitaires derrière une banderole anti- Starbucks devant le magasin. Des images largement reprises dans la presse, présentées comme des actions menées contre le magasin qui a ouvert à Montmartre… sauf que lorsque la campagne débute, le magasin n’existe pas encore ! Les travaux n’ont même pas commencé, puisque le rachat du lieu fait l’objet de nombreuses tractations entre le vendeur et les propriétaires des commerces aux alentours qui souhaitent récupérer les locaux. Les Identitaires se gardent bien de préciser que le Starbuck Montmartre n’est alors qu’à l’état de projet et que leur mobilisation « devant le Starbucks » de la place du Tertre est bidon. Tout comme les deux rassemblements annoncés dans les médias place du Tertre, ou aucun identitaire ne fera le déplacement. Il faut dire que la mobilisation sur ces deux dates des antifascistes du 18ème arrondissementavaient sans doute refroidit leurs ardeurs. Comble du ridicule, les Identitaires postent une photo d’une banderole devant un Starbucks, prise à 4-5 stations de métro du quartier où devait se tenir leur rassemblement.

Opération Gilets jaunes

Début 2014, à Lille et Paris, les Identitaires sous le nom "Génération Identitaire", lancent une campagne de "sécurisation" du métro : ils annoncent vouloir patrouiller dans les couloirs et rames de métro en groupe, équipés de gilets jaunes, pour « faire peur aux racailles ».
Une nouvelle fois les médias vont se faire écho de l’initiative, sans jamais réellement rendre compte de la réalité, en particulier sur le fait que nos valeureux apprentis-vigiles se font prendre à partir par des voyageurs outrés de leurs initiatives.

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Surtout, les patrouilles se limitent à quatre ou cinq sorties au total, le plus souvent pour prendre quelques photos dans les rames, le temps de rester dans trois stations puis de vite remonter à la surface. La campagne s’arrête d’ailleurs rapidement, mais l’objectif est atteint : à partir d’un non-évènement, les Identitaires ont fait parler d’eux dans la presse.

Nous ne savons pas encore si la campagne des Identitaires Defend Europe arrivera à son terme. Nous aurons sans doute droit durant l’été de la part des Identitaires à des photos de leurs militants, sur le bateau, en plein mer. Mais nous savons qu’entre la communication des Identitaires et la réalité il y a souvent un gouffre. La seule chose qui semble réelle dans cette histoire, c’est l’argent récolté qui finira dans les caisses du mouvement pour financer d’autres campagnes fantômes.

La Horde