Le RIF (Rock Identitaire Français)

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En mai 2004, les éditions No Pasaran publiait un ouvrage sur le Rock Identitaire Français, " Rock Haine Roll " (disponible sur le site de No Pasaran ici), une des rares tentatives de l’extrême droite française d’organiser autour de ses idées un mouvement musical populaire et cohérent. Malgré l’échec total de cette tentative, il reste intéressant aujourd’hui de se penché sur cet essai non transformé. Voici un extrait de l’introduction de cet ouvrage, auquel plusieurs animateurs de La Horde avaient participé en son temps.

Une vingtaine de musiciens, des CD vendus à 1000 ou 2000 exemplaires, des concerts dont le public oscille autour de 150 personnes et n’excède jamais les 300, une couverture médiatique plus que minimale... Pourquoi faire un livre sur le Rock Identitaire Français (RIF) ? Pourquoi risquer de faire la promotion involontaire d’un phénomène marginal qui ne sort le plus souvent de l’anonymat que dans la rubrique « faits divers » ? (…)

La volonté de produire un ouvrage sur le sujet résulte en fait d’un double intérêt. D’une part, il répond à notre souci essentiel, en tant que militants politiques libertaires et antifascistes, qui est de connaître nos adversaires. Nous avons toujours annoncé clairement notre démarche à ce sujet, que ce soit dans nos écrits ou par le simple slogan « Connaître ses ennemis pour mieux les combattre ! ». Cette volonté d’être à la fois précis et synthétique explique notre choix délibéré de ne pas inclure le RAC (Rock Against Communism), autrement dit le mouvement néo-nazi skinhead dans cette étude. Bien sûr, il existe des liens entre les deux phénomènes et la musique RAC bénéficie toujours d’une audience respectable qui lui permet de produire CD et concerts. Mais les démarches sont globalement antinomiques et justifient qu’on les distingue.

D’autre part, au delà de l’aspect militant de la question, le RIF est en lui même un sujet intéressant. C’est en effet la deuxième tentative, après le rock alternatif libertaire des années 1980, de lancer un mouvement politico culturel qui s’adresse spécifiquement à la jeunesse et revendique cette double dimension militante et culturelle. Mais c’est également le deuxième échec, et ce pour des raisons qui ne sont pas similaires. Une grande partie des personnes qui composaient les groupes de rock alternatif étaient des musiciens avant d’être des militants. Les « majors » musicales n’ont donc guère eu de mal à les réintégrer dans le circuit commercial dès que leur engagement a faibli au tout début des années 1990, avec des fortunes diverses bien entendu. Ce phénomène a marqué l’arrêt de mort d’un courant qui commençait largement à tourner en rond en terme de perspectives, et qui avait souvent atteint l’âge où l’on se pose un certain nombre de questions sur son avenir. Dans le cas du RIF, on verra dans les pages qui suivent que ses promoteurs les plus actifs ont toujours été des militants avant d’être des musiciens et, élément aggravant, des militants nationalistes, voire néofascistes. Il n’était donc pas question pour ce courant politico-musical d’espérer pouvoir s’appuyer sur le réseau d’organisateurs indépendants et de MJC qui ont assuré le développement du rock alternatif dans les années 1980. La prétention des acteurs du RIF à se poser en nouvelle alternative n’a pu masquer leur discours politique et le RIF est rapidement devenu un ghetto rassurant et mortifère.

Nous avons adopté pour cet ouvrage un plan relativement simple qui a consisté à faire le panorama de ce qui existait avant le RIF en terme de musique engagée dans le courant nationaliste puis à balayer les différents aspects de ce courant culturel : origines, groupes, labels, supports de promotion. Nous avons également tenu à envisager la réception du RIF dans les milieux nationalistes car son accueil plus que mitigé explique sans doute en partie l’échec de cette initiative. Enfin, il nous fallait revenir sur la situation de courants analogues dans certains pays d’Europe, puisque les groupes français ont toujours entretenu des contacts privilégiés avec certaines scènes, comme la scène italienne par exemple. Autant dire que nous n’avons aucunement la prétention d’avoir été originaux dans notre étude : cette démarche a déjà été développée par d’autres. En revanche, nous avons la prétention d’avoir été, dans la mesure du possible, objectifs. Pour ce faire, nous nous sommes largement appuyés sur des citations directes d’acteurs du RIF, référencées et si possible non coupées, extraites généralement de publications de ce milieu. Ces références sont aisément vérifiables. Seuls les commentaires et les analyses que nous en tirons peuvent être qualifiées de subjectives, mais nous touchons là à l’essence même des écrits politiques et donc à notre liberté d’interprétation. Pour ces raisons, nous nous sommes interdits dans la mesure du possible tout commentaire qualitatif concernant ces groupes. Certains ont pu produire une musique de mauvaise qualité, d’autres ont pu démontrer qu’ils avaient un niveau musical plus que correct. Dans tous les cas, il ne nous semblait pas opportun d’essayer de dénigrer ce courant musical sur ce plan, car tous les goûts sont dans la nature. En outre, le rock alternatif des années 1980 n’était pas toujours franchement de qualité...

Nous avons donc essayé de garder une approche strictement politique du phénomène, considérant qu’il se discréditait de lui même par ses orientations idéologiques. Pour les mêmes raisons, étant parfaitement conscients de l’opprobre qui couvre avec raison le mouvement nationaliste, nous avons préféré maintenir une discrétion relative sur certaines personnes ayant joué un rôle dans le développement du RIF mais qui semblent avoir suspendu leurs activités. Cela explique que certains noms se résument à une initiale. Nous n’avons par ailleurs cité que les noms des figures de premier plan, les figures secondaires étant laissées totalement dans l’anonymat.

Un dernier point nous semble important à préciser : les auteurs de ce livre ne sont pas des journalistes et le revendiquent. Nous sommes des militants engagés, et nous espérons simplement que le résultat de notre travail politique soit jugé intéressant, utile et rigoureux par tous ceux qui sont engagés dans la lutte antifasciste. Cela explique que nous restions dans l’anonymat car toute autre démarche ne serait que pure vanité et égocentrisme de notre part. Les lignes qui suivent sont donc assumées par tout le réseau No Pasaran, dans sa diversité mais aussi son unité dans la lutte anti autoritaire dont le combat antifasciste n’est que l’une des multiples dimensions.