La Salvetat-sur-Agout (34) : les Brigandes s’agitent, mais la résistance s’organise

Si vous avez entendu parler des Brigandes et que vous les considérez comme une simple curiosité d’internet ou une secte apolitique, sachez que cette communauté d’extrême droite tente de mettre la main depuis plusieurs années maintenant sur un petit village de l’Hérault, sans que le maire en place ne trouve rien à y redire. Mais depuis plusieurs mois, la résistance s’organise, et les premières initiatives organisées contre l’implantation des Brigandes viennent de voir le jour…

Pour celles et ceux qui n’auraient jamais entendu parler des Brigandes, on vous renvoie à quelques articles déjà publiés : précocement pour en déconstruire le discours, puis, grâce à l’aide d’antifascistes locaux, pour mettre à jour leur implantation masquée, puis encore à d’autres reprises, ici et .

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Si, au début de l’année, les Brigandes ont eu les honneurs de la presse, avec même quelques reportages racoleurs de TF1 et M6, c’est principalement autour de la personnalité de leur leader Joël Labruyère et des accusations d’activités sectaires qui pèsent sur leur communauté. Cette dimension n’est bien entendu pas à négliger, mais elle a déjà été largement traitée, et c’est pourquoi nous nous intéresserons davantage à l’aspect politique de ce groupe, à travers un décorticage de leurs premiers concerts et d’une exposition de dessins à la Salvetat cet été.

Les Brigandes en concert chez les Roudier

Depuis leur déprogrammation par Civitas de ce qui devait être leur première prestation publique le 8 mai 2016 au défilé nationaliste en hommage à Jeanne d’Arc, les Brigandes préparaient avec soin leurs futures apparitions publiques, surtout pour trouver des amis nationalistes qui ne leur tournent pas le dos à la dernière minute. Le premier concert, le dimanche 18 mars 2018, avait été organisé à Villeneuve-lez-Avignon par la Ligue du Midi, groupuscule d’extrême droite : nous avions dressé le portrait du principal animateur, Richard Roudier ici et .

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Au concert de mars, toute la famille Roudier pousse la chansonnette avec leurs amies brigandes : Richard (B), ses fils Martial (A) et Olivier (C) et sa femme Maryvonne (D). En bas, lors de la séance de dédicace, on reconnait Jean-Christophe Vée (E), qui lit le manifeste des Brigandes, et Daniel Ranc (F), deux des animateurs du fan club des Brigandes à l’époque.

Les Brigandes et la famille Roudier s’étaient déjà soutenus mutuellement par le passé, donc pas de surprise de les retrouver ensemble. 

Les Brigandes en concert au pays du pinard

C’est pourquoi il est plus surprenant que leur deuxième concert, qui s’est déroulé le 10 juin dernier, ait eu lieu dans une autre région, plus précisément à la Guiche, en Saône-et-Loire, dont un journal local a fait un compte rendu assez circonstancié. Avant de comprendre pourquoi, quelques mots sur le déroulement du concert. Comme pour le précédent, le lieu du concert avait été tenu secret, la salle ayant été réservée pour l’anniversaire de la femme d’un conseiller municipal de l’opposition, Christian Launay (cf. portrait ci-dessous).

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La dimension « privée » du concert, en dépit des annonces publiées sur internet des semaines auparavant, est la raison pour laquelle le maire, mis la veille devant le fait accompli, a préféré laisser faire : mais quelques jours après, les habitant·e·s du village feront part de leur mécontentement. Pourtant, cette « fête d’anniversaire » a pris un tour bien particulier lorsque, dès les premières minutes, Antoine Duvivier, un des principaux porte-parole des Brigandes, a dédiée la soirée à Tommy Robinson, ancien dirigeant de la très islamophobe English Defence League (EDL), arrêté en mai 2018 pour troubles à l’ordre public et condamné ensuite pour entrave à la justice. 

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Une dédicace qui a probablement réjoui Pierre Cassen et Christine Tasin, assis tous les deux au premier rang, et dont le site Riposte laïque était l’un des rares, dans la fachosphère, à avoir annoncé le concert des Brigandes.

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Amusant de voir Tasin faire autant de kilomètres pour les écouter chanter, quand on pense qu’en janvier dernier, elle déclarait sur son blog Résistance républicaine à propos des Brigandes : « E lles ne m’intéressent guère, je ne leur trouve pas un talent fou. (…) Laissons-les à leurs délires, d’autant que leur « gourou » semble effectivement avoir fumé la moquette . »

Étaient également présents les Roudier père et fils bien sûr, mais aussi Luc Sommeyre. Animateur du site Minure, ce dernier était surtout le coordinateur des Réseaux Rémora, un ensemble de « cellules » créées en 2016, avec comme objectif « d’apporter leur connaissance parfaite du terrain et leur soutien aux unités de l’Armée, de la Gendarmerie et de la Police (…) en cas d’événements graves perturbant le fonctionnement de la société . » Mais avec l’affaire AFO et ses projets terroristes, difficile de maintenir ce projet de milices à la limite de la légalité, et le réseau a mis fin à ses activités. À propos de milice, le « service d’ordre » était assuré par une mystérieuse section française des « Soldats d’Odin », dont nous reparlerons plus loin. 

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Les Brigandes prenant la pose avec leurs fans (photo des Brigandes).

Quoiqu’il en soit, après un concert de plus de deux heures, les Brigandes ont conclu par un hommage à la chanson traditionnelle locale, avec une reprise de « Joyeux enfants de la Bourgogne », dont le refrain est à lui seul une ode à la biture : « Quand je vois rougir ma trogne / Je suis fier d’être bourguignon » ! Normal, puisque le concert était organisé, apprenait-on a posteriori, par « le Réveil de Bourgogne » (visiblement avec la gueule de bois). Or, derrière cette association inconnue jusqu’alors, on trouve un certain Christian Launay, dont le nom, pour le coup, nous disait quelque chose…

Les vieux amis FN des Brigandes

Car Christian Launay a un long parcours au Front national, et pas des plus lisses : militant au FN depuis les années 1980, viré de son service d’ordre pour avoir exhibé un drapeau à croix gammée, puis réintégré dans les années 1990 pour se retrouver au cœur du scandale de Montceau-les-Mines en 1996 qui provoqua une enquête parlementaire sur le DPS, Launay s’est ensuite implanté en Saône-et-Loire, où il n’a pas laissé que de bons souvenirs dans sa fédération…

Reste à savoir ce qui a bien pu motiver Launay pour l’organisation de ce concert des Brigandes. Or, si on ignore s’il fait partie de leur fan-club de l’époque, on sait qui en étaient alors les principaux animateurs : comme par hasard, il s’agit pour l’essentiel de militants FN de la région, de la même génération que Launay… Ce qui explique aussi soit dit en passant la moyenne d’âge du public, autour de la soixantaine bien tassée.  

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Commençons par le président du fan-club, Jean-Christophe Vée. Né en 1965, ancien de la Légion étrangère et du 2e REP de Calvi, ancien commerçant, militant FN dans l’Yonne, le bonhomme n’a pas la langue dans sa poche. On vous laisse apprécier ses sorties islamophobes et sexistes et son admiration pour le maréchal Pétain ici. En revanche, dans son intérêt, on vous fait grâce de ses vidéos improbables dans lesquels, à moitié nu dans son camping-car, il partage ses petits tracas quotidiens…  

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En haut, Vée IRL et son petit pin’s FN avec le candidat FN local Alain Quéquin. En bas, sur internet, pour des vidéos sans concession (surtout avec le style).

Parmi les autres animateurs et modérateurs du groupe Facebook, on trouve une habitante de Saône-et-Loire, Corinne Mossire Langlassé, ex-militante FN passée ensuite par le SIEL, qui s’est lancée en juin dernier dans l’aventure électorale de façon autonome sous le slogan « notre France agonise, Patriotes, sauvons-la ».

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Mais son appel n’a été entendu par vraiment personne, puisqu’aux législatives à Saint-Vérand, elle n’a obtenu aucune voix (pas même la sienne), avec 0,0% des suffrages exprimés. Elle est cependant toujours conseillère municipale à Mâcon.

Daniel Ranc, 69 ans, lui, vient de plus loin, puisqu’il est du Gard, responsable FN du canton de Rousson, qui a bien failli basculer à l’extrême droite lors des élections départementales de 2015. Comme Vée, c’est un ancien militaire, et un militant frontiste de longue date.

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Daniel Ranc avec ses amis Brigandes, et en campagne pour le FN.

Bref, pas vraiment des cadors de la politique, mais des militants à l’ancienne, pas forcément très futés mais besogneux : à se demander pourquoi ils n’ont pas encore pris leur carte au Parti de la France de Carl Lang, ils ont le profil… 

Le lien entre les Brigandes et ces militants frontistes de la génération Jean-Marie apporte un autre éclairage sur le dernier coup de pub du clan Labruyère : faire une chanson en l’honneur de Jean-Marie Le Pen en réussissant à faire jouer « le Vieux » dans leur clip (avec ce savoureux commentaire de JMLP lors du making-of : « vous êtes belles comme des camions militaires !  ») et, plus fort, à se faire inviter aux 90 ans de l’ex-président du FN, pour jouer en ouverture à la petite sauterie à Montretout le 30 juin dernier. 

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Un papi Le Pen aux anges, et un public feignant l’indifférence à la dernière lubie du Vieux…

Une vraie victoire politique pour les Brigandes, pas vraiment en odeur de sainteté dans le milieu nationaliste tradi où Jean-Marie Le Pen reste une référence, et ce d’autant plus que l’hebdomadaire Rivarol , ennemi juré des Brigandes, n’avait pas réussi à faire venir Le Pen à la fête organisée sur une péniche pour son anniversaire… Joël Labruyère lui-même, dans une vidéo de janvier dernier, révèle qu’il aurait participé en 1965, en tant que bénévole, au « cirque Tixier », une caravane électorale du candidat populiste d’extrême droite Tixier Vignancour, aux côtés de Roger Holeindre et qu’il aurait alors croisé Jean-Marie Le Pen, tout en précisant ne pas connaitre ce dernier personnellement. 

Brigandes über alles

Mais tout n’est pas rose au pays des fans des Brigandes, car depuis, le groupe Facebook de ces frontistes old school n’est plus le fan-club officiel et a été remplacé, pour d’obscures querelles internes, par un autre, plus passe-partout, et animé cette fois par un authentique Brigand, Ruedi Füllemann (qui était déjà animateur dans le groupe précédent), alors que sur leur site les Brigandes prétendent ne pas être présentes sur Facebook (comprend qui peut…).

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Secrétaire de Barka Productions (qui produit les Brigandes), Füllemann se présente comme « l’ingénieur » du groupe, mais il est aussi celui qui fait le lien avec un groupe de fans allemands, les Brigandes Freunde, créé il y a un peu moins d’un an et dont quelques membres s’étaient déplacés aux concerts. C’est aussi par son intermédiaire qu’une petite maison d’édition allemande, Arnshaugk Verlag a publié une traduction du manifeste des Brigandes.  

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En bas : Christelle Gordeaux, Uwe Lammla, Ruedi Füllemann et Uwe Nolte.

En 2012, un élu parlementaire de Die Linke s’était interrogé devant le landtag de Thuringe au sujet de la présence des éditions Arnshaugk à un salon du livre local. Les éditions Arnshaugk distribuaient en effet des livres des éditions Ares et Antaios, proches de la Nouvelle Droite et de l’extrême droite radicale : elles ont participé par exemple en 1993 à l’université d’été de la publication neo-droitière Junge Freiheit , et ont même publié un texte et une interview dans cette revue en 2008. Plus récemment, Arnshaugk Verlag a publié un livre sur les chrétiens dans l’AfD, préfacé par Beatrix von Storch.

Les Brigandes s’exposent

Mais Ruedi Füllemann est aussi le mari de Chrystelle Gordeaux, « l’artiste » du clan des Brigandes, qui a dessiné de nombreux éléments de décor pour leurs clips. Depuis son arrivée à la Salvetat, elle a mis ses « talents » de graphiste au service de la municipalité, par exemple en proposant, dans le cadre de l’association « L’Art dans tous ses états », un atelier pour enfants de peinture sur tissu (aujourd’hui, l’atelier de peinture est organisé par l’association Pomme d’Or, associée aux Brigandes et subventionnée par la mairie à hauteur de 300 euros).

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En haut, Gordeaux en plein travail pour les Brigandes : en bas, son atelier pour les enfants de la Salvetat…

C’est également elle qui a réalisé l’affiche d’un festival de poésie organisée par « L’Art dans tous ses états » et soutenue par la ville en juillet 2017 : mais elle s’était alors permis à cette occasion d’apposer sur l’affiche le logo de Barka Production, ce qui n’a pas été du goût de tou·te·s les participant·e·s du festival, et l’affiche avec son logo a fini au pilon. Mais Gordeaux a toujours la mairie dans la poche, comme le montre sa récente exposition « Les Vikings peuple de la mer » dans le centre d’art de la ville, annoncée dans le programme estival de la commune. 

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La mythologie nordique n’est pas en soi, bien entendu, une thématique d’extrême droite : ce folklore très imagé est même assez propice à l’expression artistique. Mais le projet de Gordeaux n’est pas culturel, ni vraiment artistique : il est avant tout politique.

Pour commencer, celles et ceux qui s’intéressent à la réalité historique en seront pour leur frais, tant on est ici au niveau zéro de l’authenticité. Ainsi, n’importe quelle personne s’intéressant un tant soit peu à cette culture sait qu’on ne doit pas parler de « drakkar » (un terme inventé au XIXe siècle) pour désigner les embarcations vikings, mais utiliser le mot « langskip ». 

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Surtout, présenter les vikings comme de fiers guerriers assoiffés de conquête tient plus de l’image d’Épinal, et non de la réalité : les hommes qui menaient les raids sur l’Europe de l’Ouest étaient sans doute les mêmes qui menaient une activité commerciale avec cette même Europe, car leurs nombreux aller-retour sur les routes maritimes leur permettaient de repérer les zones mal défendues. Surtout, Gordeaux choisit de citer l’écrivain d’extrême droite Jean Mabire qui a certes beaucoup fait pour magnifier le mythe Viking et le paganisme chez les nationalistes, mais qui est surtout connu pour ses ouvrages complaisants sur les Waffen SS [1], sans citer une seule fois les travaux de Régis Boyer, spécialiste français et européen des civilisations du nord, ce qui est assez révélateur à la fois d’une certaine orientation idéologique et d’une ignorance crasse.

Chrystelle Gordeaux d’ailleurs ne s’en cache pas vraiment, puisqu’elle explique ainsi à Vincent Lapierre, journaliste proche d’Égalité et Réconciliation, le but de cette exposition : « Conserver l’identité européenne, c’est ça le plus important. » Quelques sites nationalistes, comme Synthèse nationale, ont d’ailleurs fait la promotion de l’exposition. Quant aux « Soldats d’Odin » (ceux venus assurer la « sécurité » à leur concert de Guiche), ils ont eux aussi essayé d’en faire la promotion dans les réseaux odinistes.

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Des "Soldats" pas si anodins…

Pour rappel, les Soldiers of Odin sont à l’origine une milice qui avait défrayé la chronique en Finlande en 2015, en organisant des patrouilles de rue pour « lutter contre la délinquance étrangère ». Le concept avait par la suite fait des émules ailleurs dans le monde, en particulier aux États-Unis et au Canada, et jusqu’au concert des Brigandes, en France, seule une section bordelaise avait un peu fait parler d’elle il y a maintenant bientôt deux ans. Or, en février dernier, un groupe Facebook « Soldats d’Odin Officiels France » voit le jour, en se déclarant indépendant de la maison mère finlandaise (en gros, ils ne veulent plus payer leur cotisation annuelle de 25 euros). 

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La fine équipe des "Soldats d’Odin"…

Présidé par un certain Daniel Larmet, cette nouvelle mouture s’est constituée autour d’une plateforme politique pour le moins rudimentaire [2]. Nicolas, Emmanuel, Myriam et les autres sont pour la plupart des bikers vieillissants, des skinheads sur le retour ou simplement des gens en manque de lien social, qui tentent à travers le folklore des SOO, leurs surnoms nordique et leurs t-shirts signés au nom du groupe, à donner un peu de sens à leur existence. Grand bien leur fasse : mais le problème, c’est qu’ils véhiculent aussi des idées racistes et nationalistes, et qu’ils veulent désormais mettre leur délire mytho en pratique en jouant les gros bras pour les Brigandes…

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Le hasard faisant bien les choses, ces nouveaux Soldats d’Odin organisent leur « convention nationale 2018 »… à la Salvetat-sur-Agout. C’est pourquoi, dimanche dernier, cette petite bande (une demi-douzaine de rouleurs de mécanique) est venue prêter main forte aux Brigandes dans le village, pour mettre un petit coup de pression à des proches du collectif M (cf. ci-dessous) qui tractaient sur le marché. Brigandes et Soldats d’Odin les ont ainsi insultés et menacés, avec des petits mots doux comme « fais gaffe à ta gueule » ou « on a ta photo, maintenant on va plus te lâcher, droitsdel’hommiste de merde (sic). » Rouler des mécaniques en s’en prenant à quelques personnes isolées, c’est une chose : mais les Soldats d’Odin ont-ils vraiment les moyens de leur politique ?

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L’intimidation est d’ailleurs en passe de devenir une habitude chez les Brigandes et leurs soutiens. Ainsi, si les notables salvetois sont venus de leur plein gré au vernissage de l’exposition viking, tout le monde à la Salvetat n’est pas fan du travail de Chrystelle. Qu’à cela ne tienne, quelques « brigands » en délégation, à la fois mielleux et menaçants comme à leur habitude, ont fait la ronde des commerçants du bourg pour savoir pourquoi certains s’étaient abstenus de placer sur leur vitrine l’affiche de l’expo : si certain·e·s ne s’en sont pas laissés compter, la peur a aussi joué son rôle, et certain·e·s se sont dépêché·e·s de mettre l’affiche bien visible…

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Cette déclaration de Fullemann vise-t-elle les nouveaux amis odinistes des Brigandes ?

Un maire plutôt complaisant

Cette exposition n’est malheureusement pas le seul exemple concret du soutien municipal aux activités brigandes, et plus particulièrement du soutien personnel du maire de la ville, Thibault Estadieu.

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Thibaud Estadieu.

Né en 1970 et originaire de Nice, médecin généraliste de profession, il est le maire de La Salvetat-sur-Agout depuis 2008 : quand en 2015 la petite troupe des Brigandes s’installe dans le coin, anime les soirées dansantes avec le groupe Ultra-Sixties, dès le début, Estadieu les soutient avec ferveur. Il y a à cela des raisons objectives, puisque l’arrivée de ces familles avec enfants a permis à l’époque de sauver la classe du village ; les Brigandes ont également mené à la même période des opérations de séduction, en rendant de menus services aux habitant·e·s, et en proposant des animations pour les enfants, ce qui a pu plaire aussi au maire d’une commune vieillissante. Mais comment expliquer que ce soutien se maintienne, voire se renforce, alors que l’année suivante, les Brigandes retirent leur progéniture de l’école publique salvetoise, préférant l’école à la maison, et que les premières plaintes de Salvetois·e·s de longue date à leur encontre se multiplient ?

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Il est possible que, simplement par vanité ou pour ne pas donner raison à ses opposants politiques, le maire refuse aujourd’hui de se dédire. Mais avec son titre de « Ringard de l’année » que lui a attribué l’association Chiennes de garde après ses déclarations sexistes à l’encontre de Audrey Crespo-Mara il est vrai qu’Estadieu partage la même idéologie rétrograde et réactionnaire que les Brigandes. Peut-être d’ailleurs l’équipe municipale se retrouve-t-elle davantage qu’elle ne veut bien l’admettre dans le discours politique des Brigandes : Estadieu n’a-t-il pas déclaré « j’aime mieux accueillir les Brigandes dans ma commune que des réfugiés comme à Lacaune » , Son premier adjoint, à France 3, que « l e problème, ce n’est pas les Brigandes, c’est les médias » ?

Quoiqu’il en soit, les Brigandes pourraient bien à terme avoir des ambitions électorales, et il n’est pas sûr alors que le maire sortant soit de la partie. D’ailleurs, le projet politique des Brigandes reste flou, et ce d’autant plus qu’une certaine tension est palpable entre l’orientation ésotérique de Joël Labruyère et l’approche plus politique d’Antoine Duvivier, et de Maxime Billaud, qui fait le plus souvent l’interface avec le milieu nationaliste (du moins avec ceux qui veulent encore bien leur parler).

La résistance s’organise

Face à cette agitation brigande, des Salvetois·e·s ont décidé de ne pas rester les bras croisés. En janvier 2017, un « Collectif des antifascistes des Hauts-Cantons » voit le jour : il vient de publier son quatrième bulletin, avec au sommaire un article sur le prosélytisme local des Brigandes, une visite détaillée de l’expo sur les vikings, un très amusant pastiche sur le thème « une journée au Clan » ainsi qu’un argumentaire sur la nécessité d’une riposte antifasciste. 

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Cliquez sur l’image pour télécharger le bulletin

Le collectif M, une association déclarée en mars 2018, « s’oppose à toutes les démarches prônant la discrimination sous quelque forme que ce soit », et a comme projet l’ouverture d’un lieu associatif à la Salvetat, pour en faire « un lieu d’espace et de culture », et aussi pour offrir une alternative aux lieux tenus par les Brigandes. 

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Cliquez sur l’image pour télécharger le tract

Enfin, un appel antifasciste a été lancé à tou·te·s les antifascistes de la région et au-delà, pour se retrouver et marquer une présence antifasciste à la Salvetat tout le week-end des 4 et 5 août prochains, lors des festivités organisées par la mairie de la Salvetat, et auxquelles les Brigandes pourraient bien essayer de s’associer, en particulier à l’occasion de l’aubade prévue le dimanche à 10h. Pour celles et ceux qui seraient intéressé·e·s, contactez-nous par e-mail pour avoir les informations pratiques.
La Horde

Notes

[1Il les décrit comme « les fils des vieux guerriers germaniques surgis des glaces et des forêts » dans son ouvrage de 1976 Les Jeunes Fauves du Führer, la Division SS Hitlerjugend dans la bataille de Normandie.

[2Sur leur page Facebook : « Que ceux qui veulent continuer le combat pour la France nous suivent, que ceux qui veulent rapporter de l’argent à la Finlande s’en aillent. Nous sommes une fraternité, une famille, une association loi 1901 , nous avons besoin de personnes courageuses et déterminées à défendre les valeurs de notre patrie : faites le savoir, recruter, parler en autour de vous !!! Nous sommes Soldats d’Odin Officiels, nous sommes Français !!! »