La Salvetat (34) : Poésie : 1 - Brigandes : 0

Une victoire de la parole poétique sur son instrumentation par l’extrême droite : voilà qui mérite bien un petit article. Pour celles et ceux qui ne les connaitraient pas ou qui les auraient oubliées (les bienheureux !), un présentation des Brigandes, groupe musical dont le racisme décomplexé n’a d’égal que la médiocrité musicale, est à lire ici, encore ici et . Pour les autres, voici ce qui s’est récemment passé à la Salvetat...

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Les Brigandes prennent un peu trop leurs aises à la Salvetat...

Les tentatives d’infiltration puis de noyautage de mouvements de gauche, voilà une vieille stratégie confusionniste. Dans les Hauts-Cantons, à La Salvetat sur Agout, l’infiltration touche la totalité de ce qui peut se faire localement en matière culturelle. Dernier exemple en date : le festival annuel de poésie de la Salvetat sur Agout des 11-12-13 août qui avait cette année pour thème « Poésies d’Afrique », et dont l’invité d’honneur était Gabriel Okoundji, poète francophone congolais.

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Une erreur s’est glissée dans cette plaquette de presentation. Sauras-tu la retrouver ?

Or, quelle ne fut pas la stupéfaction de plusieurs participants en découvrant, sur les dépliants publicitaires annonçant la manifestation, parmi les logos des subventionneurs, celui de « Barka Productions », le producteur du groupe « Les Brigandes », « Barka » étant un des pseudos de leur maître à penser Joël Labruyère. Or ces dames [1] venaient justement d’en remettre une couche dans la provoc’ raciste avec leur dernière oeuvrette « Merkel muss weg », où des demoiselles effarouchées courent dans les rues du village poursuivies par des barbus en djellaba et en rut, le tout sous-titré dans un allemand de cuisine : on leur conseillera à ce propos de revoir entre autres le passif et l’orthographe de "traditionell" (un comble !). Quant à considérer dans ces mêmes sous-titres qu’évoquer le procès de Nuremberg (en photo) signifie "diffamer" ( verleumden) et non "culpabiliser" le peuple allemand comme elles le chantent, voilà qui donne à la chanson une dimension négationniste à même, si on était taquin, de la faire tomber sous le coup de la loi.

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Aussi, un membre du collectif antifasciste local s’est immédiatement chargé d’alerter tous les participants. Et ceux-ci, après visionnage, bien éprouvant pour eux, de quelques vidéos brigandines, et après deux jours et demi d’un rude et beau combat, sont parvenus à obtenir des organisateurs :

1) la suppression de ce logo, placé là par une des Brigandes en rétribution de la maquette qu’elle avait réalisée gracieusement pour le compte de l’association organisatrice, « L’Art dans tous ses états », association infiltrée par ces dames depuis un an déjà ;

2) la destruction de tout document qui serait porteur de cette marque d’infamie.

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Une victoire, c’est pas si souvent. Saluons les camarades poètes ! Voilà qui fait se sentir moins seuls. Car :

Dans un monde où tout est conduit vers le non-sens de la marchandise, il ne reste que la poésie pour renaturer l’ensemble des relations et des valeurs. Mais qu’il ne reste qu’elle à pouvoir le faire ne garantit pas qu’elle puisse le faire, car son pouvoir n’agit que secondé par un effort. Le vieil effort d’attention qu’exige toujours l’acte de culture aussi bien que l’acte d’amour, et que débilite actuellement le culte de la passivité.
in Bernard Noël, "Que peut la poésie", Nouveau Recueil n° 69 , juin-août 2002

La Horde  (en collaboration avec quelques antifascistes locaux)

Notes

[1A noter également que les Brigandes jouent désormais démasquées dans une formation locale, "Les Salvetoises", dans un registre qui en fait un peu le chaînon manquant entre les Brigandes et Ultra-Sixties...