La déchéance de nationalité "made in France"

RE janvier 2016

Le collectif anti-sécuritaire Résistons ensemblea publié la semaine dernière son premier bulletin de l’année 2016 : dans son édito, il revient sur les implications du projet de lois visant à priver de leur nationalité française les binationaux qui porteraient « une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation » , rappelant aux passages que les fanatiques qui ont commis les attentats de janvier et novembre 2015 sont bien des produits "made in France"…

C’est au nom de la France que le pouvoir veut créer, cette fois-ci officiellement, deux catégories de Français. Les 3-4 millions de binationaux, à 90% descendants d’immigrés post-coloniaux, seront susceptibles d’être privés de la nationalité française, et d’être expulsés du pays où ils sont nés et/ou ont étudié, travaillé, aimé, fondé une famille… pour avoir commis « un acte de terrorisme » ou plus généralement « une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation » . Cette définition du projet de loi est donc à géométrie variable.

Quels sont les « intérêts fondamentaux de la nation » pour ce gouvernement, ou encore mieux pour le pouvoir FN qui se profile ? Ça pourrait être le blocage d’une gare, d’une usine, la lutte pour la grève générale, une « mauvaise » pensée, la désobéissance d’un fonctionnaire à une mesure inique… On a vu récemment l’acharnement général contre les grévistes d’Air France pour une pauvre chemise arrachée. N’oublions pas que, dès la prise de pouvoir par Pétain, c’est au nom de ces mêmes « intérêts fondamentaux de la nation » qu’on avait privé de nationalité des milliers de Juifs naturalisés, de résistants ou d’opposants en commençant par Charles de Gaulle !

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« Mesure symbolique » nous dit-on, mais justement symbole de quoi ? Celui de la famille Le Pen car c’est leur définition des « français de papier » que la gôche a repris. Peu importe les zigzags tactiques de Hollande-Valls pour faire avaler cette ignominie et peu importe si finalement la mesure ne passe pas, de toute façon, le mal est fait puisque le tampon est déjà posé sur le front de millions de « binationaux » : au regard de la loi tu n’es plus un Français comme les autres. Au délit de faciès se rajoute désormais le délit de sang, le délit de mauvais parents.

Et puis, de quelle fabrique sortent donc les assassins de Charlie, de l’Hyper Cacher, du Bataclan ou du Stade de France pour qu’on leur retire ainsi leur nationalité française ? De l’Enfer de Dante ? Non, ils sont bien « Made in France », c’est bien de cette France faite de racisme, des guerres au Moyen-Orient, en Afrique, du lâchage des Palestiniens, du chômage, de la répression policière, du mépris… qu’ils sont issus.

La « déchéance » comme marqueur politique et écran de fumée derrière lequel se cache l’idée de graver dans le marbre de la Constitution un état d’urgence permanent, qui ne dit pas son nom, devenant ainsi la « normalité » : ça c’est ce que veulent et fabriquent consciemment les hommes du pouvoir de gôche et de droite. Mais il y a aussi ce qu’ils ne maîtrisent pas, tout aveuglés qu’ils sont par leur obsession de se maintenir au pouvoir en en écartant le FN : le devenir du régime qu’ils sont en train d’installer durablement. Pour ne prendre qu’un exemple, avec la généralisation des assignations à résidence Valls-Hollande dessinent les plans de futurs camps d’internement pour opposants qualifiés de « terroristes » et de « radicaux ». En effet, comment matériellement assigner à résidence des milliers de personnes (ne serait-ce que les fichés S qui s’élèvent déjà à 20000 dont la moitié n’ont rien à voir avec une radicalisation religieuse) ? C’est pour résoudre ce problème « matériel » qu’avaient été créés sous Vichy les premiers camps d’internement.

La bande des quatre, Valls-Hollande-Sarkozy-Juppé, est en train de déclencher une avalanche, qui, comme c’est le propre des ce phénomène, échappe à ses créateurs et dévaste tout, y compris, souvent ces mêmes initiateurs. Ces gens-là, avec leur folie du pouvoir ont pour seule idée de doubler le FN par la droite et c’est tout le pays qu’ils amènent, ce faisant, au bord de l’abîme. Est-ce que, à ce rythme-là, la V. République tiendra, sous sa forme parlementaire actuelle, ne serait-ce que jusqu’en 2017 ? On se le demande.

Tout est joué désormais avant la catastrophe ? Pas tout… il y a des petits murets à construire qui, comme à la montagne, peuvent peut-être briser cette avalanche mortifère.
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