Interview de Jean-Yves Camus dans 20 minutes : Le FN veut « enraciner des jeunes du partis » localement

Cantonale à Brignoles : Le FN veut « enraciner des jeunes du partis » localement

Créé le 07/10/2013 à 16h26 — Mis à jour le 07/10/2013 à 17h28

POLITIQUE - Pour le politologue Jean-Yves Camus, si Jean-Marie Le Pen comptait gagner par le haut - la présidentielle - sa fille opte pour la stratégie inverse...

L’extrême droite est arrivée largement en tête dimanche au premier tour de l’élection cantonale partielle de Brignoles, dans le Var, avec près de 49,5% des voix réparties entre le candidat du FN et un dissident. Un coup de semonce pour l’UMP et le PS, malgré une très forte abstention, à 150 jours des élections municipales. Jean-Yves Camus, politologue, spécialiste des nationalismes et des extrémismes et chercheur associé à l’Iris, a décrypté pour 20 Minutes la stratégie du Front national au niveau local.

Que sait-on du candidat qui est arrivé en tête du scrutin, Laurent Lopez ?

Quel que soit le candidat, il aurait bénéficié de toute façon de l’attrait des électeurs pour ce parti. D’un point de vue global, les idées du Front national ont remporté 49% des suffrages car le candidat dissident, Jean-Paul Dispard, défendait les mêmes idées. Reste que Laurent Lopez est en effet plus en phase avec l’image que le parti veut donner maintenant.

Le FN met-il en place une stratégie de reconquête des mandats locaux ?

Le FN fait un vrai effort pour enraciner des trentenaires ou des quadragénaires, le plus souvent vierges de tout engagement radical, acceptables pour l’électeur FN mais aussi pour une frange de l’électorat UMP. Des gens biens sous tout rapport comme Etienne Bousquet-Cassagne qui est arrivé au second tour à Villeneuve-sur-Lot.

Quelle est la stratégie en place en vue des élections municipales ?

Le but du FN est de faire entrer ces jeunes cadres du parti dans des municipalités et de les laisser s’enraciner afin de devenir des notables locaux. Et cette stratégie commence déjà à porter ses fruits. En 2008, le FN a fait de très mauvais résultats aux élections municipales et souhaite aujourd’hui revenir dans les conseils municipaux et prendre trois ou quatre villes de taille moyenne, par exemple Carpentras dans le Vaucluse ou Fréjus dans le Var, voire des villes plus petites.

Le FN veut fournir une formation réelle à ses candidats pour en faire des élus crédibles. Car le parti traîne toujours comme un boulet la gestion catastrophique de quatre municipalités dans le sud de la France [Marignane, Toulon, Vitrolles et Orange, dont le maire, Jacques Bompard, a quitté le parti en 2005]. Il ne faut pas oublier non plus les élections européennes qui sont toujours dans le viseur du FN. Ce sont des élections qui suivent la règle du scrutin proportionnel et avec une thématique très porteuse qui concentre tous les ressentiments : l’Europe.

Des alliances locales auront-elles lieu avec l’UMP ?

Oui, pour ancrer ces jeunes mais aussi pour montrer à l’appareil national de l’UMP qui ne veut pas entendre parler d’alliances que certains élus, sur le terrain, sont prêts à braver l’interdiction.

Quels sont les atouts et les points faibles du FN pour ces mandats ?

Parmi les atouts du FN vient d’abord une désaffection massive des partis dits « traditionnels ». A Brignoles on voit bien que l’UMP est très loin derrière. Et la riposte du PS ne remporte pas le succès escompté car les électeurs ne veulent pas se contenter d’un engagement moral contre le FN, ils veulent des actes politiques.

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