États-Unis : à propos des meurtres racistes de Charleston

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Il y a quelques jours, neuf personnes étaient assassinées au cours d’un office religieux en Caroline du Sud, parce qu’elles étaient noires. Après les violences racistes perpétrées par la police américaine ces derniers mois et les manifestations qui ont suivi, qui revendiquaient que les vies des Noirs sont importantes (Black Lives Matter), les Américains qui se sont engagés pour une société multiculturelle se retrouvent confrontés à la violence d’extrême droite, même si on ne sait pas exactement pour l’instant dans quelle mesure le responsable des morts à Charleston était organisé. Quoi qu’il en soit, il nous a semblé important de publier le communiqué du Center for New Community de Chicago, avec qui nous avons travaillé ces dernières années, en particulier sur la question de la musique néonazie. En effet, ce texte montre la difficulté que le pays rencontre à faire un travail de mémoire et de reconnaissance des crimes racistes remontant à l’époque de la ségrégation et, plus loin encore, à celle de l’esclavage, alors que c’est précisément cette histoire qui entretient un climat dans lequel les Américains qui ne sont pas blancs vivent dans la peur.

Chicago, le 18 juin 2015

La fusillade qui a eu lieu hier soir dans une église noire historique de Charleston, en Caroline du Sud, rappelle de façon tragique que les violences racistes font partie de l’histoire américaine et continuent à avoir des conséquences meurtrières.

L’équipe du Center for New Community fait part de ses condoléances les plus sincères à la congrégation de l’Église épiscopale méthodiste africaine de l’Emanuel (AME), aux familles des victimes ainsi qu’à toute la communauté de la ville de Charleston.
Un homme blanc est entré dans l’église de l’AME durant l’étude biblique pour y rester une heure avant d’ouvrir le feu sur les fidèles et de tuer neuf personnes. La police a arrêté celui qu’elle soupçonne être l’auteur des coups de feu, Dylann Storm Roof, le lendemain des faits. La photo du profil Facebook du suspect le montre vêtu d’une veste arborant des drapeaus de deux anciens régimes suprémacistes blancs.

Cette église, qui est aussi la plus ancienne congrégation de l’AME dans le Sud des États-Unis et qu’on appelle affectueusement « Mère Emanuel », occupe une place particulière dans l’histoire des États-Unis et dans celle du mouvement pour les droits civiques.

Cette attaque a eu lieu dans un contexte bien particulier, qui est celui de la violence d’État contre les Noirs en Caroline du Sud, et dans une communauté qui a subi la terreur de l’héritage de l’esclavage et des violences racistes.

Kalia Abiade, qui est chargée de la défense des intérêts du CNC, a déclaré : « Alors que Mère Emanuel fait face à cette tragédie et que les familles des victimes se préparent à enterrer leurs morts, un drapeau confédéré continue de flotter sur le Capitole de l’État. »

Le CNC recommande vivement à tous les Américains d’être vigilants face à l’augmentation des violences racistes perpétrées contre les Afro-Américains et contre d’autres groupes et de prendre immédiatement des mesures pour traiter les manifestations de racisme dans leurs communautés.

Ces dernières semaines, les communautés issues des minorités ont eu à subir la terreur de la part d’un large éventail de militants ou de sympathisants d’extrême droite, dont des néonazis venus protester contre un événement organisé à Saint-Louis dans le cadre de la campagne « Black Lives Matter » ou une manifestation armée contre une mosquée à Phoenix, Arizona.

Aujourd’hui, nous devons nous rappeler les paroles de Charles Morgan Jr., un jeune avocat blanc d’Alabama, qui prit la parole au lendemain des attentats perpétrés contre l’église de Birmingham en 1963 : « Quatre petites filles ont été tuées hier à Birmingham. Une communauté folle d’inquiétudes et de remords demande qui a posé cette bombe. Était-ce un Noir ou un Blanc ? Il faudrait répondre : nous sommes tous responsables. »

Cette déclaration reste vraie après la tragédie de la nuit dernière.

Alors même que nous travaillons à une démocratie qui permette vraiment l’intégration et une société multiraciale, il faut que nous affrontions la réalité du racisme en face. « Le déchaînement de violence que constitue la fusillade de la nuit dernière est un avertissement tragique : tant que nous ne prendrons pas en compte le racisme, d’hier et d’aujourd’hui, les communautés seront menacées et les violences racistes continueront. », a déclaré Jill Garvey, le président du CNC.

« Nous devons tous condamner les violences racistes ainsi que leurs auteurs, et mettre un terme à l’héritage laissé à cette nation, à cause duquel les Afro-Américains, les autres communautés de couleur et les minorités religieuses vivent dans la terreur. »
Center for New Community