Dieudonné : "la guerre, c’est la paix"

Lu sur le site antifasciste Mémorial 98  :

Dieudonné banni des médias ? Etrange légende dont la diffusion croît parallèlement à son audience dans les mêmes médias. Existe-­­t­-il aujourd’hui beaucoup d’hommes politiques, beaucoup de partis qui ont la possibilité d’avoir leur communiqué de presse intégralement repris, sur un sujet qu’ils ont eux-­mêmes choisi, et le jour où ils ont choisi d’en parler ? Dieudonné jouit de ce privilège.

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Ainsi il proclame aujourd’hui [14/12/2014], par l’intermédiaire de ses avocats qu’il a décidé de « faire la paix » avec un ennemi qu’il a lui même constitué et circonscrit : « certains représentants de la communauté juive » et certaines « associations antiracistes ». Il entend convoquer une séance de négociations sous l’égide du Ministre de l’Intérieur, rien de moins.

Que font les médias face à cette grossière manoeuvre ? Ils publient la nouvelle, et pour certains, comme I­Télé, produisent l’intégralité du texte de propagande du politicien. Non contents de lui avoir gracieusement offert une tribune, ils s’en vont benoîtement jouer les émissaires : puisque Dieudonné avait notamment initié une pétition pour la dissolution de la LICRA, ils somment la LICRA de répondre sur la « proposition de paix » de Dieudonné.

Dans cette affaire, ce n’est pas l’attitude de Dieudonné qui est surprenante. Sur le fond, le courrier présenté par ses avocats est la reprise de son discours halluciné habituel : il serait une victime, les Juifs et les antiracistes seraient les bourreaux tout puissants qui s’acharnent sur sa personne et à travers lui, sur la pauvre France. L’antisémitisme explose en France, le racisme également, l’homophobie tout autant, et la mouvance dieudonniste compte parmi les responsables premiers de cette explosion. Mais renverser la réalité est une des caractéristiques premières de la rhétorique raciste et antisémite.

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Quant à la raison objective de ce courrier, elle est évidente : Dieudonné lance une nouvelle tournée de spectacles. Or depuis au moins dix ans, jamais sa promotion n’a reposé sur autre chose que le scandale médiatique orchestré par des initiatives immondes mais stratégiquement adaptées au fonctionnement de ces mêmes médias. Après avoir sciemment déclaré souhaiter l’envoi de personnalités publiques dans les chambres à gaz lors des premières représentations de son dernier spectacle, le néo­nazi pouvait difficilement aller plus loin dans l’ignominie au premier degré, d’autant qu’il avait déjà utilisé l’invitation d’un négationniste connu sur scène lors de sa tournée en 2009. De plus, l’appel au meurtre et l’apologie ouverte du génocide commis par les nazis avaient pour une fois déclenché une réaction des pouvoirs publics, l’interdiction de quelques uns de ces spectacles, qu’il avait d’ailleurs très vite contourné en en changeant l’intitulé et en se cantonnant ensuite à un antisémitisme violent, mais banalisé.

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Parce qu’il est sans nul doute, un des meilleurs communicants du moment, et sans nul doute aussi aidé et soutenu par d’autres talentueux propagateurs de haine, il joue donc une autre carte, celle du retournement victimaire. Il appelle ça une « quenelle ». Contrairement à ce que disent certains, la quenelle n’est pas un salut nazi inversé : c’est un salut néo­nazi tout court, et la différence avec le salut nazi classique réside avant tout dans le regard de la société qui le reçoit. Or aujourd’hui, une partie de notre société ne reçoit plus l’antisémitisme comme tel : il lui faut une croix gammée, un appel ouvert à mettre les gens dans les chambres à gaz, une référence appuyée au nazisme historique, pour avoir encore un minimum de réaction.

Il suffit donc au néo­nazi moderne de se déclarer non ­antisémite, pour que les médias s’interrogent et en fassent même un événement. Il y a quelques mois à peine, Dieudonné, dans une vidéo , proposait à la mère d’Ilan Halimi, une « rencontre » pour « faire la paix » et dans cette même vidéo, il parlait en riant du cadavre d’Ilan Halimi et de son exhumation éventuelle. Il y a quelques semaines, à peine, Dieudonné diffusait une autre vidéo de quelques dizaines de secondes, tenant des propos négationnistes en présence de son plus jeune fils, un gamin qui n’a même pas dix ans, en comparant la non-existence du père Noël et celle des chambres à gaz. Il y a quinze jours, avec Alain Soral, il prenait prétexte de la création d’un potentiel parti politique pour étaler sa haine antisémite pendant plus d’une heure.

Mais peu importe, il lui suffit de déclarer aujourd’hui vouloir faire la paix avec « la communauté Juive » et les « antiracistes » pour éveiller l’intérêt des journalistes, qui trouvent parfaitement normal, dans ces conditions d’aller chercher quelques « représentants Juifs » et des « antiracistes » pour les sommer de répondre.
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