Nancydes fachos (trop) tranquilles en manif

Lu sur manif-est.info :
Ces derniers mois, les manifestations anti-pass sanitaire ont permis à l’extrême droite locale de manifester sans inquiétudes dans les rues de Nancy et de Metz. Analyse et descriptif.

Le pass sanitaire, devenu depuis le 24 janvier un pass vaccinal, est un outil qui procède de la répression d’une partie de la population et implique le contrôle de tous et de toutes, il est donc nécessaire de lutter contre. Pour limiter la très forte propagation du virus SARS-COV2, le gouvernement choisit une nouvelle fois de dégainer un arsenal autoritaire et inefficace, stigmatisant les personnes non vaccinées, voire les reléguant au ban de la société, et ceci plutôt que de proposer des campagnes d’informations simples et accessibles sur la vaccination et ses enjeux, afin de faire reculer la méfiance suscitée en très grande partie par les mesures incohérentes du gouvernement. De plus, il assume parallèlement un allègement des mesures sanitaires favorisant ainsi la circulation intensifiée du virus, et ceci dans le plus grand mépris des personnes fragiles et/ou non vaccinées.
En parallèle de cette dérive de plus en plus autoritaire, toujours pas de moyens supplémentaires alloués pour une ouverture de lits ou de création de postes dans le service public hospitalier, ni moyens supplémentaires pour la recherche publique. Le Bloc Antifasciste s’oppose au pass vaccinal. Pour autant, nous devons lutter avec clarté et sans complaisance vis à vis des campagnes antivax, antiscientifiques, complotistes et confusionnistes et surtout sans l’extrême droite !

A Nancy, cela faisait longtemps qu’on n’avait pas vu des fachos manifester tranquillement dans les rues. Fin octobre 2000, on avait eu droit à une trentaine de militants locaux du GUD (à l’appel d’Unité radicale Nancy et sous couvert d’un "Front de la jeunesse"), qui avaient éructé leur haine contre les immigrés et la mondialisation, en vieille-ville. Au final, trois d’entre eux (Clément Cuny, Pierre Catherinot et Julien Chivoret) avaient été condamnés pour provocation à la discrimination raciale. Durant cinq années dans la décennie 2010, une vingtaine de militant.es réactionnaires de "SOS tout-petits" (les troupes de feu Xavier Dor), soutenu.es et protégé.es par quelques naziskins du groupuscule "Lorraine nationaliste" (dont parfois l’inénarrable nationaliste Pierre-Nicolas Nups), venaient prier sur une place en centre-ville, pour des "Rosaires pour la vie" et surtout contre le droit à l’avortement. Bien que bloqué.es par de nombreux CRS, des antifas étaient venu.es s’y frotter !

Manifestation du GUD à Nancy en octobre 2000
Manifestation du GUD à Nancy en octobre 2000

Été-automne 2021, fin du confinement : avec le beau temps, la saison des manifs reprend, avec notamment celles contre le pass sanitaire et aussi parfois contre le vaccin. Et quelle surprise (ou presque) d’y voir fachos et royalistes s’y rendre tranquillement, en arborant fièrement leurs couleurs... En effet, en plus de certains slogans clairement haineux, complotistes, voire antisémites, les fafs ne se cachent plus. On a par exemple pu y apercevoir le fameux "Qui ?", début août à Metz, sur la pancarte de la nationaliste condamnée Cassandre Fristot, ou bien la pancarte avec la référence au film de propagande nazie "Forces occultes", en septembre toujours à Metz, ou encore le "Qui ?" en gros au dos d’une blouse blanche ponctué d’un "Non au génocide gaulois", à Nancy cette fois-ci. Mais soyons clairs, notre propos n’est pas de dire ici que ces manifs anti-pass ne sont remplies que de fachos. C’est juste un bilan factuel et antifa de ces cortèges éclectiques.
C’est que, éparpillé.es parmi les manifestant.es, on voit de tout dans ces manifs : cathos extrémistes qui prient pour le salut de nos âmes, royalistes qui couperaient bien la tête de Macron, nationalistes qui en profitent pour étaler leur haine envers tout ceux qui ne sont pas blancs et un paquet de complotistes qui rajoutent leur touche délirante à ce déjà sale mélange. Mais s’ils ne se cachent plus, encore faut-il les repérer. Car les codes vestimentaires se confondent parfois et évoluent, tout comme les symboles. Alors comment les identifier ?

Les Cuny, entreprise nationaliste de père en fils

En ce qui concerne les cathos tradis et intégristes, rien de très compliqué. Leurs croix sont ostensibles, les portraits de la vierge Marie et leurs chapelets aussi. Sans oublier les sacrés cœurs fièrement brandis (cœur rouge et saignant, surmonté d’une croix chrétienne). Vous les entendez toute.s prier, plus ou moins fort et bien à l’arrière des manifs, en espérant que Dieu vienne en aide au peuple français. Et sur certain.es vous retrouvez même de colorés (mais puants) tee-shirts de "La Manif Pour Tous" ou de pèlerinages, afin d’être encore plus clairs dans leurs revendications. On y croise également quelques militants anti-avortement, déjà vus lors des rassemblements locaux de "SOS Tout-petits". Enfin, à Metz, les cathos intégristes de CIVITAS ont tranquillement manifesté dans les rues et discuté peinards avec leur amie nationale-catholique Cassandre Fristot. La Moselle est un des départements où plusieurs militant.es de CIVITAS (maintenant structuré comme un parti politique) s’étaient présenté.es aux élections législatives de 2017.

Les royalistes de l’Action française se repèrent assez facilement avec leurs fleurs de lys, traditionnellement jaunes sur fond bleu (déclinées sur des drapeaux, sweat-shirts, autocollants, pendentifs, tatouage sur une cheville, etc.). Ah, et vous pouvez aussi les retrouver bras dessus, bras dessous avec les cathos, avec qui ils ont des tonnes d’affinités ! Le royaliste Cédryk Calphy et le responsable départemental de "Debout la France" Massimo Nespolo, tous deux candidats aux dernières municipales à Nancy sur la même liste réactionnaire, y ont régulièrement fait des apparitions ou des prises de parole publiques. Tout comme un passage de l’ex libraire FN et soutien financier des extrêmes droites locales depuis plusieurs décennies, Jean-Marie Cuny, déambulant sous une belle pluie estivale.

Nancy Royalistes et catholiques, bras dessus bras dessous
Royalistes et catholiques, bras dessus bras dessous

Par contre, côté skins nationalistes, c’est là que les choses se compliquent. Loin de leur look bourrin et paramilitaire, il faut reconnaitre leur look dit "casu" pour "casual" (décontracté), leurs détails et leurs codes qui se veulent discrets : polos et casquettes Fred Perry, tee-shirts Lonsdale, baskets Adidas noires à bandes blanches ou encore les casquettes et bobs noirs "Lyle and Scott" avec l’aigle jaune. La marque à la mode "The North Face" les intéresse aussi, probablement pour le côté nordique et viking blond aux yeux bleus. Dans les rues de Nancy, par petits groupes de quatre, de six ou en couple, les sigles et les tatouages des nationalistes et des naziskins tentent d’être discrets mais sont sans équivoque : par exemple, marteau de Thor sur le mollet d’un premier ou en pendentif pour un second, croix celtique autour du cou, tee-shirt de musique oï, tatouage d’une hirondelle (symbole des bagarreurs) et rune d’Odal tatouée sur une main. Globalement donc, les fleurs de lys, les croix sacrées et autres symboles nationalistes côtoient parfois les revendications plus progressistes ... Ces catholiques, nationalistes et royalistes sont aussi souvent des habitués de la librairie de droite extrême nancéienne "Les deux cités", de ses réunions et de ses séances de dédicaces d’auteurs.

Nancy Naziskins, des looks reconnaissables mais codés
Naziskins, des looks reconnaissables mais codés

Et puis il y a les autres : les complotistes et les confusionnistes. Eux, ce n’est pas difficile de les repérer : ils et elles sont fier.es de l’être. On peut alors voir un sweat-shirt des conspirationnistes de QAnon-France, un tract ou une pancarte de "Réinfo-Covid" (mouvement complotiste animé par le très médiatique Louis Fouché, qui fait des liens avec l’extrême droite), une casquette "Hold up" du documentaire conspirationniste français sorti fin 2020 ou un tee-shirt "Je suis complotiste", mais également des pancartes aux slogans très clairs, invitant à s’informer sur la Covid-19 par le biais des islamophobes de "Riposte Laïque" ou encore du média d’extrême droite "Radio courtoisie".

Nancy Electre, son étoile jaune et les Illuminati
Electre, son étoile jaune et les Illuminati

Et enfin, les manifestant.es nancéien.nes ont parfois eu droit à une visiteuse très locale : Electre, militante nationaliste et anti-Femen, très proche il y a quelques années de "Dissidence Française" de Vincent Vauclin et engagée un temps à Nancy au "Comité Jeanne" (le clan des derniers fidèles de Le Pen père, tenu ici par le nostalgique de Pétain, Pierre-Nicolas Nups). Electre, ex-adhérente au FN, arpente donc les rues de Nancy avec son mégaphone, son look paramilitaire et volontairement tape-à-l’oeil, ainsi qu’avec des pancartes, des références et des slogans nationalistes, complotistes et nauséabonds (étoile jaune, Illuminati, Macron grimé en Hitler, Pepe la grenouille, "pass nazitaire", etc.).

Nous continuons à affirmer, que l’extrême droite n’a strictement pas sa place dans nos rues et qu’on ne doit pas la laisser tranquillement manifester et récupérer la colère populaire ! #nancyantifa !

BAF - Bloc Antifasciste Nancy (Twitter = @BAF_Nancy)

Source: https://manif-est.info/A-Nancy-des-...