Brésil : retour sur la dictature de 1964 à 1985

Le magazine Mondes sociaux a publié sur son site un intéressant article qui revient sur la dictature qui sévit au Brésil de 1964 à 1985, autour du film le film Brésil, du coup d’État de 1964 à la CNV , réalisé en 2015, qui retrace les années sombres d’une dictature qui s’est imposée en plusieurs temps. 

Le Brésil a basculé à l’extrême droite lors de l’élection de son président de la République, le 28 octobre 2018 : Jair Bolsonaro prendra ses fonctions pour un mandat d’une durée de quatre ans. L’élection de ce nouveau président, nostalgique d’une dictature qui perdura de 1964 à 1985, fait peser une lourde menace sur la démocratie brésilienne.

Un coup d’État militaire soutenu par une partie de la société civile

Le Brésil de 1964 est le terrain d’une forte polarisation entre la droite et la gauche au pouvoir. La « Marche de la Famille avec Dieu et pour la liberté », rassemble à São Paulo, au mois de mars 1964, un demi-million de personnes et sera utilisée ensuite comme preuve de légitimité populaire du putsch.

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Le coup d’État est déclenché moins de deux semaines plus tard par les militaires dont les troupes sont lancées de l’intérieur du Brésil (État du Minas Gerais). Au même moment, au Sénat, le président de la séance du 1er avril 1964, le sénateur Auro de Moura Andrade, déclare la présidence du Brésil vacante et le président en fuite à l’étranger, alors même que ce dernier, João Goulart, est au Brésil, et plus précisément à Porto Alegre.

Une dictature par étapes : promulgation des Actes Institutionnels

Ces Actes Institutionnels ont été successivement promulgués entre 1964 (Acte Institutionnel n° 1) et 1968 (Acte Institutionnel n° 5), renforçant à chaque fois le régime dictatorial. Si des emprisonnements et des violences ont eu lieu dès 1964, le régime brésilien voulait néanmoins faire preuve d’une apparence démocratique. La liberté de la presse et celle de manifester sont dans un premier temps maintenues. L’Acte Institutionnel n° 2 (1965) interdit tous les partis politiques et impose deux partis, l’ARENA (Alliance rénovatrice nationale) et le MDB (Mouvement démocratique au brésil).

En 1968, le pays est le théâtre de grandes manifestations étudiantes et de résistances ouvrières. L’Acte Institutionnel n° 5, promulgué en décembre 1968, constitue un coup d’État dans le coup d’État. Il supprime la liberté de la presse et donc la liberté d’expression, et surtout, il supprime l’Habeas Corpus, rendant impossible tout recours juridique de la part de personnes arrêtées arbitrairement.

Parallèlement aux centres militaires, des centres clandestins (dont le plus connu est celui de Petropolis) sont créés pour torturer et tuer les « subversifs ».

La sécurité nationale au nom de la lutte contre le communisme

Les régimes dictatoriaux d’Amérique latine invoquent la lutte contre la menace communiste dans le cadre d’une doctrine, qui est la même partout : la sécurité nationale. L’ennemi ne serait pas un ennemi extérieur mais un ennemi intérieur. Et n’importe qui peut être l’ennemi. D’où l’importance du renseignement, qui doit être obtenu par tous les moyens. La torture est institutionnalisée comme pratique d’État, et enseignée dans les académies militaires. Des instructeurs français, forts de leur expérience de la guerre d’Algérie, sont notamment consultés.

Des mouvements armés d’extrême-gauche se développent sous la dictature au Brésil, ils seront tous liquidés par les militaires entre 1968 et 1972. Mais des mouvements de résistance « pacifiques » se développent aussi dans les chantiers d’usines et dans les universités.

Desserrement de l’étau

À partir de 1974, une ouverture lente et graduelle est instituée par le régime. La fin des années 1970 est marquée par des manifestations de rue et des grèves. Un mouvement populaire se crée autour de la question de l’amnistie puis de l’élection directe pour la présidence de la République. Des attentats à la bombe sont commis par des groupes d’extrême droite, mais la période de transition est ouverte…