MémoireBella Ciao, des rizières à la lutte antifasciste

Tout le monde connaît l’air de la chanson. Beaucoup connaissent son refrain entraînant. Mais en ce qui concerne son origine, c’est beaucoup plus flou... Une chose est pourtant sûre : Bella Ciao est une chanson de la classe travailleuse.

Lu sur le site de Solidaires :

Alors que la série TV La Casa de Papel a redonné une nouvelle popularité au chant antifasciste italien, il est intéressant de connaître son histoire. Ou du moins de tenter d’y voir clair...

Des ouvrières pour la journée de 8 heures

Les origines des paroles de Bella Ciao sont à écrire au conditionnel. Une de ses racines se trouverait dans les rizières du Pô, ce fleuve du nord de l’Italie, où des Mondines – des ouvrières saisonnières qui désherbaient les rizières – se sont révoltées pour dénoncer leurs mauvaises conditions de travail. Les paroles du chant qui deviendra Bella Ciao parlent d’une lutte victorieuse instaurant la journée de 8h pour les ouvrières, obligées jusqu’en 1908 de travailler sans limite.

En 1944, ce chant aurait été modifié pour coller à la lutte qui faisait rage en Italie (et ailleurs en Europe) entre les partisans (résistants au fascisme) et les fascistes. C’est à ce moment que les paroles actuelles auraient été écrites par un désherbeur de rizière, Vasco Scansani : « O partigiano, portami via/O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao/O partigiano, portami via/Ché mi sento di morir » (Ô partisan, emmène-moi/O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao/ Ô partisan, emmène-moi/Je suis prêt à mourir).

Des partisans italiens à la Libération. (Photo Carlo-Maria)

Si on ne peut affirmer avec certitude que ce chant a été entonné par des partisans lors de la Seconde Guerre mondiale, il est probable que des résistants d’Émilie-Romagne, au moins, l’aient chanté en luttant.

Chant fédérateur

À l’époque, plusieurs chants engagés cohabitaient, dont le plus célèbre, après Bella Ciao, est Fischia Il Vento (Souffle le vent). Mais ce chant révolutionnaire étant le patrimoine des communistes, il n’aura pas le même effet fédérateur que Bella Ciao dont les différentes composantes de la résistance (communiste, socialiste, anarchiste et même démocrate-chrétienne) peuvent se retrouver dans les paroles.
https://youtu.be/4CI3lhyNKfo
Communistes et socialistes populariseront le chant dans les années 1950 en éditant des recueils de chants antifascistes faisant la place belle à Bella Ciao.

Le chant de la classe travailleuse

Et aujourd’hui ? La série TV La Casa de Papel et des artistes populaires (Maître Gims, Vitaa, Slimane, etc.) ont donné une popularité à Bella Ciao auprès d’un public qui n’en avait jamais entendu parler avant. Même si ce n’est pas nouveau. Du côté francophone, l’acteur et chanteur Yves Montand l’a reprise en 1963. Le groupe de folk/rock/punk italien Modena City Ramblers n’a jamais cessé de la jouer en concerts entre les années 1990 et aujourd’hui – les participants de l’édition de 2013 de la Fête de la Solidarité, ManiFiesta, peuvent en témoigner.
Dans les stades de football, sur les plateaux TV, dans les manifestations, Bella Ciao est aujourd’hui un classique. Un classique antifasciste, mais aussi féministe, révolutionnaire et populaire. Car si ses origines sont incertaines, nous pouvons néanmoins affirmer une chose : ce chant est à nous, il fait partie du patrimoine de la classe travailleuse.

Source: Solidaires